Le foot, « ce n’est pas le pied »

222 millions d’euros est un montant qui pourrait correspondre à l’économie annuelle réalisée en diminuant de 3 euros par mois l’aide au logement des plus de 6 millions d’allocataires qui la perçoivent, ou au chiffre d’affaires annuel d’une belle entreprise de plusieurs milliers de collaborateurs, ou à 9 années de chiffre d’affaires d’une entreprise en zone rurale de 280 employés, menacée actuellement de fermeture.

C’est en fait le coût annoncé d’un transfert vers le Paris-Saint-Germain.

Si on change d’échelle, 30 millions d’euros par an, c’est deux fois le revenu du numéro 1 mondial de l’automobile en fin de carrière, qui règne sur un empire de centaines de milliers de salariés, ou le revenu annuel de plus de 1600 travailleurs au SMIC.

C’est aussi le salaire annuel proposé au transféré.

Ces montants hors du commun font plus rêver qu’ils ne suscitent d’émotion.

Certains diront à juste titre qu’il faut rémunérer le talent ; certes, mais à combien devrait prétendre un équilibriste ou un trapéziste de haute voltige dans un cirque. D’autres objecteront que la carrière est courte ; bien sûr, mais avec un capital de 30 millions d’euros, soit une année de salaire, une personne peut subsister ad vitam æternam, uniquement avec les intérêts générés par les intérêts.

Selon la presse, pour s’offrir ce transfert, le club devra « vendre » d’autres joueurs. Heureusement que, dans ce commerce de jambes, la vente au poids ou à la découpe ne peut pas se pratiquer.

Sommes vertigineuses et commerce de personnes ne sont pas les valeurs de base du sport ou, tout du moins, celles du baron de Coubertin ; ce ne sont pas non plus celles de celui qui devint évêque de Paris après avoir distribué son pain aux pauvres. Ironie de l’histoire, il s’appelait saint Germain.

Quel prestige pour la France, si elle prenait l’initiative d’ouvrir ce chantier mondial de la moralisation, pour que le sport redevienne du sport !

Philippe Nourrisson