Gaulois têtes de bois

La ministre de l’Education nationale du précédent quinquennat réagissait en son temps à l’annonce de M. Sarkozy : « dès que l’on devient Français, nos ancêtres sont Gaulois ». Un cours professoral d’histoire et de géographie qui semble extrait de « Science et Vie », dédié à l’auteur des propos mais aussi à tous les autres profanes en la matière, a été enseigné par la ministre, non sans agacement : « Oui, il y a parmi nos ancêtres des Gaulois ; il y a aussi des Romains, des Normands, des Celtes, des Burgondes ». De son côté, sa consœur au ministère du Travail s’est également déclarée « choquée », critiquant la vision de la France, « particulièrement étriquée » selon elle, de l’ancien président. Sans mentir, si la compétence de ces ministres de « l’ancien monde » se rapportait à leur culture, elles exerceraient probablement des fonctions importantes dans la gouvernance actuelle. Les urnes nous en ont préservé, fort heureusement d’ailleurs, sinon leur pair au ministère de l’Economie, à l’époque, et actuel président en exercice, qui voit les Français comme des « Gaulois réfractaires au changement », n’aurait pas échappé à leurs sarcasmes inutiles.

Nos ancêtres étaient les habitants d’un territoire appelé la Gaule, qui couvrait la France actuelle mais aussi la Belgique, les Pays-Bas, une partie de l’Allemagne, de la Suisse et de l’Espagne. Nous descendons donc bien des Gaulois, mais pas uniquement selon Ernest Renan qui écrivait à la fin du XIXe siècle : « Le Français n’est ni un Gaulois, ni un Franc, ni un Burgonde. » Il est tout cela. Une fois rassurés sur nos origines, nous pouvons néanmoins nous interroger sur l’hostilité de nos proches voisins à toute réforme, la Gaule s’étendant bien au-delà de nos frontières actuelles à l’est et au nord. Notons toutefois que, au rythme des réformes, la Gaule s’est transformée en plus d’un millénaire jusqu’à devenir la France, la plus grande puissance du monde aux XVIIe et XVIIIe siècles. Si donc, aujourd’hui, elle est devenue réfractaire au changement, c’est aux républiques successives qu’elle le doit.

La deuxième question qui se pose est de comprendre ce qu’est le changement. Si c’est moraliser la vie publique, réduire les passe-droits et les régimes spéciaux, gommer certaines inégalités, accorder des allocations proportionnées aux besoins élémentaires et à l’effort pour améliorer sa situation, faire qu’un euro cotisé conduise aux mêmes effets pour tout le monde… les Français n’y sont pas opposés et c’est même pour cela qu’ils se sont prononcés il y a plus d’un an. Mais si c’est laisser dériver les dépenses publiques, augmenter les taxes et les impôts, ou faire tout autre chose que les promesses électorales, ne parlons pas de changement mais plutôt de continuité de la même politique depuis cinquante ans.

Le vrai changement sera de remplacer la République par une monarchie qui conduira les réformes avec résolution, dans la continuité, sans changer de cap à chaque mandature ou au gré des cotes de popularité.

Nous sommes bien des Gaulois, mais pas forcément des réfractaires !

Philippe Nourrisson