…et les mots pour le dire viennent aisément

La République est toujours en marche, mais elle avance au ralenti, pour ne pas dire au radar.

En effet depuis le premier juillet, la vitesse est limitée à 80 km/h sur les voies secondaires, en conformité avec la règle démocratique du 80/20, 20 étant le pourcentage des Français plutôt favorables à cette mesure. Espérons que l’effort ne sera pas vain car il s’agit d’épargner annuellement trois à quatre cents vies. Bien que l’effet soit secondaire et non forcément recherché, les infractions à la nouvelle limitation de vitesse vont générer de nouvelles recettes, dans une proportion estimée à 40%. Le produit des amendes résultant de la réduction de 10 km/h sera affecté à un fonds d’investissement créé pour améliorer les soins aux accidentés de la route. Si la morale reste donc sauve, espérons seulement que nos concitoyens ne s’obligeront pas à dépasser la vitesse limite, pour financer généreusement ce nouveau fond, uniquement par altruisme. Rappelons à cet effet que l’Alliance royale préconise le respect des lois et préfère les combattre par des mots, bien choisis, lorsqu’elles sont trop nombreuses et parfois ineptes.

À ce sujet, le Premier ministre s’exprime en ces termes : « Pour le dire de façon peut-être un peu triviale, l’objectif, ça n’est pas pour… le monde. L’objectif, c’est de faire en sorte qu’il y ait moins de morts et moins de blessés graves ».

« Tout ce qui se conçoit bien s’énonce clairement… » mais les mots pour le dire, que la décence nous oblige à supprimer, s’entendent difficilement lorsqu’ils viennent d’un homme politique de haut rang. C’est aussi une façon pour E. Philippe de se repentir, en tirant les leçons de son interception en octobre 2015 à 150 km/h, sur une voie limitée à 110 km/h. Le devoir d’exemplarité trouve ses limites dans la conduite tout comme dans les mots.

Le Président donne deux ans pour convaincre par la preuve ; la mesure serait donc réversible et, si elle n’est pas probante, cela laisse supposer qu’il faudra encore injecter quelques dizaines de millions pour changer de nouveau les panneaux. « Faire et défaire, c’est toujours travailler » et, comme le disait fort élégamment en son temps, l’humoriste Pierre Dac : « Une erreur peut devenir exacte, selon que celui qui l’a commise, s’est trompé ou non ».

Philippe Nourrisson