Plus fort que Robespierre !!

image004Vincent Peillon ancien ministre de l’Education nationale est l’auteur d’un livre : « La révolution n’est pas terminée » paru au Seuil. J’ai évoqué cet ouvrage lors du discours prononcé le 21 janvier place de la Concorde et l’on m’a pressée de développer cette allusion. Alors voici :

Morceaux choisis :

« Née de la révolution, la République doit fonder une légitimité sur une insurrection, un ordre sur un désordre, une tradition sur une rupture, une autorité sur une hubris » p 17

« C’est bien une nouvelle naissance, une transsubstantiation qui opère dans l’école et par l’école, cette nouvelle Eglise avec son nouveau clergé, sa nouvelle liturgie, ses nouvelles tables de la Loi. » p 18

« Le socialisme se présente, en tant que socialisme républicain et démocratique, comme l’accomplissement même du libéralisme, celui-ci étant incarné par ce nouvel évangile que constitue la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen » p.82

« La synthèse républicaine se trouve obligée d’inventer une métaphysique nouvelle et une religion nouvelle où c’est l’homme qui va apparaitre comme un infini. Cette religion n’est pas une religion du Dieu qui se fait homme. Elle est une religion de l’homme qui a à se faire homme dans un mouvement sans repos. Mais elle conduit la démocratie républicaine à chercher une part essentielle de sa ressource dans l’idée d’une religion nouvelle, non révélée et même laïque. »p 141

« Ce qui manque au socialisme pour s’accomplir comme la pensée des temps nouveaux, c’est une religion nouvelle : ‘donc un nouveau dogme, un nouveau régime, un nouveau culte doivent surgir afin qu’une nouvelle société prenne la place de l’ancienne.’ Littré » p 149

« Cette religion de l’Humanité serait donc une religion de l’individu, les droits de l’individu sont donc portés au plus haut et sacrés. »

« Cette religion peut, en effet, prétendre à l’universel : cette idée de la personne humaine, nuancée différemment selon la diversité des tempéraments nationaux, est donc la seule qui se maintienne, immuable et impersonnelle.(…)La religion de l’Humanité n’est pas seulement une religion nationale. Elle est une religion pour l’humanité tout entière dans le respect de tous les individus, elle conjugue l’universalité et la différence.

Et cela est plus vrai en France que partout ailleurs, car c’est la France qui a donné au monde ces principes et formulé cette religion de l’Humanité. »p 160

« Il y a dans la république une autre dimension que celle des simples faits, et comme une profondeur spirituelle, voire religieuse. »p. 161

« Non seulement le temps qui suit la Révolution est un temps de formidable renouveau religieux mais la révolution va être présentée elle-même comme une religion nouvelle »p 162

« Mais le sens de ce que signifie alors la religion, la foi, le divin n’a pas le même que dans les religions révélées et les Eglises d’autorité. « p 164

« Nous sommes bien loin on le voit de la Vulgate républicaine qui identifie république et positivisme croyant chasser par là toute référence à une transcendance. C’est une surprise pour beaucoup de jeunes gens d’aujourd’hui d’apprendre que les devoirs envers Dieu sont demeurés aux instructions officielles jusqu’en 1923 et que les théoriciens de l’école de Jules Ferry se flattaient non pas d’avoir mis en place l’école sans Dieu mais l’école où le sentiment religieux est partout, d’avoir surtout brisé le monopole de l’Eglise sur la religion et la transcendance. Cela étant, il ne faudrait pas se tromper sur le sens de ce spirituel républicain, de cette profondeur de la république, et faire comme si cette alliance du théologique et du politique n’était que la reproduction de ce qu’on connaissait déjà avant la révolution

Car la seconde erreur consiste à prétendre, l’inverse, que la préoccupation religieuse est la même sous la république que sous la monarchie » p 167

«La religion républicaine ne peut être celle de l’Ancien régime, la religion catholique, parce que celle-ci est une religion de servitude, inadaptée à la liberté. Pour des raisons liées à l’histoire de France elle ne peut non plus être liée à la religion réformée. (…)Cela n’empêche pas la république de penser qu’il faut une religion pour la république, puisque les échecs de cette dernière, et de la révolution elle-même sont liés à l’incapacité où elles furent de se doter d’une religion. » p 171

« Lorsque nous disons que la république n’est pas terminée, c’est aussi cela que nous voulons dire. La révolution ouvre une ère nouvelle, elle fait époque et non événement selon l’expression de Joseph de Maistre, parce qu’elle change jusqu’à la modalité du religieux lui-même. »p 175

« Cette religion recherchée ne peut se contenter de reproduire la religion ancienne et de fabriquer un nouveau dogme. La religion des temps modernes ne saurait être une religion au sens du catholicisme pontifical. La démocratie a besoin d’une religion. Mais elle change la nature même de la religion, et son concept.
Pour déraciner l’ancienne religion, il faut donc trouver une religion qui soit compatible avec l’âme des temps nouveaux, c’est-à-dire avec la liberté. Sur la nature de cette religion, sans dogme, sans Eglise, sans rite, où non seulement chaque homme est prêtre mais ou aussi chaque homme est philosophe il convient d’être prudent »p 183

« L’école républicaine apparait ainsi comme le creuset du corps politique, celle qui assure les fonctions jusque-là dévolues à la religion » p 184

« L’école sans Dieu est l’instrument de cette religion »p 191

« C’est ce travail qui est commencé, c’est la révolution qui se continue » p 210

Ces citations ne donnent qu’un faible aperçu des développements de l’auteur mais elles sont suffisamment explicites pour donner à voir les arrière-pensées de ce qui prône la laïcité républicaine . Robespierre et son Etre suprême peuvent aller se rhabiller. Il apparait de plus en plus clairement que la République est elle-même une religion. Le président socialiste de l’Assemblée nationale, Claude Bartolone le déclarait le 18 janvier sur RTL : « Regardez le temps qu’il a fallu pour faire accepter à la religion catholique le fait qu’il y a une religion suprême pour chacun d’entre nous : c’est la religion de la république ». Les Français sont donc pris en tenaille entre une double ligne de feu : les menaces d’un Islam conquérant et l’oppression d’une religion qui ne dit pas son nom, qui ne montre pas encore son visage mais qui entre en phase offensive. La France survivra car n’en déplaise à Zemmour, le génie de la France est immortel mais le combat sera rude. Ce sera le roi ou le chaos